~ Mémo-Histoire ~

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81 - Ducs d'Anjou & Rois de Sicile -

L'affaire débute en 1264 lorsque Charles d'Anjou, frère de Saint-Louis & comte de Provence par son épouse Béatrice, est choisi par le pape Urbain VI comme héritier du Royaume de Sicile qui relevait du Saint-Siège, le pape cherchant un "champion" pour s'opposer aux prétentions de Manfred de Hohenstaufen. Victorieux de son adversaire, Charles d'Anjou investit toute l'Italie.

Mais il se heurte bientôt à la couronne d'Aragon ; en effet, Pierre II, qui a épousé la fille de Manfred, souhaite expulser l'Angevin de Naples et de Palerme pour s'y établir.

Charles d'Anjou ayant mécontenté les Italiens par ses exigences, sa lourde fiscalité et son excessive rigueur, le 30 mai 1282, à l'heure des Vêpres, éclate une révolte à Palerme et dans toute la Sicile ; les Français sont massacrés : ce sont les "Vêpres Siciliennes" ; quelques mois plus tard, le roi d'Aragon débarque dans l'île pour l'occuper, ce qui sonne le glas de la domination angevine en Sicile.

Conservant toutefois la partie continentale du royaume de Sicile, Naples & Bénévent (Campanie), Charles d'Anjou conserve l'espoir de reconquérir la Sicile. En 1284, son héritier, Charles II dit le Boiteux (ca. 1254-1309) tente l'aventure mais il est battu et fait prisonnier.

Par l'intermédiaire du roi d'Angleterre Édouard I°, Philippe IV le Bel, roi de France, négocie le règlement du conflit en Sicile et par le traité de Tarascon du 19 février 1291, Alphonse III d'Aragon, successeur de Pierre II, promet de ne plus intervenir dans les affaires italiennes, conservant toutefois la Sicile qu'il confie à son jeune frère, Jacques ; Charles II, remis en liberté, conserve Naples et la Provence, renonce à l'Anjou et au Maine, que le roi de France donne à son frère, Charles de Valois (1270-1325), gendre de Charles II d'Anjou, le Valois renonçant en contrepartie au titre de roi d'Aragon qui lui avait été octroyé par le pape Martin IV.

En 1380, Jeanne I° de Naples, dépourvue de postérité, sur les conseils du pape d'Avignon, adopta Louis I°, duc d'Anjou & frère de Charles V ; c'est le retour des princes d'Anjou dans le guêpier italien.

Ce choix ayant provoqué la révolte du successeur légitime, Charles de Duras, petit-fils de Charles II et cousin de Jeanne, Duras s'empare de Naples et fait étrangler la reine en 1382. Louis I°, héritier de la Provence, après avoir assis son pouvoir sur ce comté, part reconquérir le royaume de Naples, sans toutefois parvenir à s'emparer de Naples. Aidé d'Alexandre V, pape élu par le concile de Pise, en 1409 Louis II attaque son rival. Ladislas de Duras fils et successeur de Charles de Duras, chasse les napolitains de Rome en janvier 1410, bat les forces de Ladislas à Roccasecca en 1411, mais est contraint de regagner la France.

Avec le concours du condottiere Muzio Sforza, Ladislas s'efforce de prendre sa revanche, ce qui ne fait qu'étendre l'anarchie régnant sur le royaume de Naples et dans les États pontificaux. A sa mort en 1414, sa sœur Jeanne II ne parvient pas davantage à rétablir l'ordre mais se brouille avec Sforza qui met son épée au service de Louis III d'Anjou, fils de Louis II ; ce prince angevin reprend le chemin de Naples mais Jeanne II fait appel au roi d'Aragon, Alphonse V le Magnanime, et le choisit comme successeur ; occupé à conquérir la Corse celui-ci accourt après avoir conquis la Sardaigne ; l'Aragonais ayant les "dents trop longues" Jeanne déchire l'acte d'adoption, oblige Alphonse à quitter Naples et adopte Louis III d'Anjou. Celui-ci tient en effet des droits de son grand-père Louis I°, adopté par Jeanne I°, et de Jeanne II, cousine de cette dernière, descendante de Charles d'Anjou et fille de Charles de Duras.

Mais il reste encore un prétendant, Alphonse V, qui ne pardonne pas à Jeanne sa répudiation et à Louis III de l'avoir supplanté ; il reste tranquille jusqu'à la mort de Louis III, le 12 novembre 1434 ; Jeanne II ratifie le choix de René d'Anjou, frère de Louis, fait par Louis pour lui succéder ; et le jour même de son décès, le 2 février 1435, elle exprime sa volonté suprême de voir le royaume de Sicile revenir à René d'Anjou.

Mais celui-ci est encore prisonnier des Bourguignons depuis la défaite de Bulgnéville le 2 juillet 1431 ; alors Alphonse V proclame ouvertement ses intentions de saisir la couronne ; l'appui du pape Eugène IV, suzerain de Naples, va à la maison d'Anjou et les sujets du royaume appellent de leur vœux ce René qui leur paraît, de loin, un prince charmant et fortuné. En attendant la venue du Roi, un conseil de régence est formé, mais les seigneurs qui en sont écartés manifestent leur mécontentement et prennent le parti d'Alphonse V lequel, tenant la Sicile voisine, débarque en avril 1435 sur le continent, s'empare de Capoue et met le siège devant Gaète que défendent les Génois pour le compte du roi René ; recevant du duc de Milan un renfort inespéré, après un dur combat naval devant Ponza, les Aragonais sont battus le 5 août 1435 et Alphonse V est contraint de se constituer prisonnier au moment où sa nef va sombrer ; le roi d'Aragon est remis entre les mains du duc de Milan, Philippe-Marie Visconti, les compétiteurs à la couronne de Sicile étant tous deux prisonniers !

En octobre 1435, Isabelle, l'épouse de René d'Anjou, débarque à Gaète pour apprendre que le duc de Milan vient de remettre en liberté Alphonse V, ce qui la place dans une situation extrêmement périlleuse ; elle est cependant reçue en grande pompe la 25 octobre 1435 par les Napolitains, accepte l'hommage de la noblesse et prend possession de Capoue et de la Calabre.

Mais par une attaque inopinée, le 2 février 1436 Gaète retombe entre les mains des Aragonais ; d'habiles distributions d'or et de titres détachent bon nombre de seigneurs du parti angevin. Isabelle cherche des alliés, Milan s'étant déclarée contre elle, Florence étant neutre et Venise indifférente. Restent Gênes, où le nouveau doge Thomas de Campofregozzo s'empresse de prendre le parti des Angevins, et le pape Eugène IV qui, longtemps indécis, est politiquement amené à embrasser la cause de René et lui envoie des secours. Pendant toute l'année 1436, les Aragonais étendent leur emprise ; le 19 mai 1438, enfin libéré des geôles bourguignonnes, le Roi René débarque à Naples, avec son fils aîné Jean de Calabre & Marie de Bourbon, épouse de ce dernier.

Alphonse d'Aragon attaque les angevins par les Abruzzes puis entreprend le siège de Naples. Mais un tir aragonais sur un monastère situé près des remparts de la ville, conduite sacrilège pour ces Aragonais, conduit à la mort du frère d'Alphonse ; ce décès conjugué au mauvais temps, le contraint alors à lever le siège pour se retirer à Capoue puis à Gaète d'octobre à novembre 1438.

Au printemps 1439, René reprend le contrôle total de Naples, le Château-Neuf et le Château de l'Œuf, les deux citadelles de l'entrée de Naples, encore tenues par les Aragonais, tombent en août 1439.

Un renversement de situation d'une partie des troupes de René, conduit au siège de Naples en novembre 1441, la ville étant prise par les Aragonais en juin 1442.

L'aventure italienne des Angevins est terminée.



27/04/2016