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6C - La répression de l'insurrection vendéenne -

Ces victoires républicaines ne rassurent pas pour autant les généraux & les Représentants en Mission, la longue errance de la colonne de Vendéens lors de la Virée de Galerne, alors que l'on croyait l'insurrection presque écrasée, ayant terrifié le pays. Estimant l'ensemble de la région dominée par la Contre-révolution ou le fédéralisme, ils accentuent la répression qui continue de s'abattre contre les insurgés, la Convention n'étant pas informée autrement que par des rapports fallacieux.

a/ La terreur au nord de la Loire.

Après la Virée de Galerne, les Représentants en Mission Prieur de la Marne, Turreau, Bourbotte, Thirion, Bissy, Pocholle, Tréhouart & Le Carpentier, mettent en place des commissions militaires révolutionnaires pour juger les prisonniers vendéens & chouans, comme les habitants suspectés de complicité avec les rebelles et les soldats républicains accusés de fuite ou de désertion.

En Normandie, la répression débute dès la fin du siège de Granville des 14 & 15 novembre 1793 avec 43 condamnations à mort à Granville, 13 à Coutances, 189 à Alençon.

Dans la Sarthe, les commissions militaires et le tribunal criminel font guillotiner ou fusiller 185 personnes au Mans et 42 à Sablé-sur-Sarthe. En Mayenne, la Commission révolutionnaire juge 1 325 personnes en 10 mois et en fait guillotiner 454 à Laval, Mayenne, Ernée, Lassay-les-Châteaux, Craon & Château-Gontier.

Trois commissions militaires sont mises en place en Ille-et-Vilaine. À Rennes & Fougères, du 21 novembre 1793 au 5 juin 1794, la commission Brutus Magnier juge 744 personnes et prononce près de 270 condamnations à mort, tandis que la commission Vaugeois en prononce 84 à Rennes & Vitré, dont le prince de Talmont, général de la cavalerie vendéenne, guillotiné à Laval. À Saint-Malo, la commission militaire de Port-Malo ou "commission O'Brien" en prononce pas moins de 200.

A ces données il convient d'ajouter le décès des prisonniers malades ou succombant aux terribles conditions de détention.

b/ La terreur nantaise.

Envoyé en mission dans les 5 départements bretons par décret du 14 août 1793, Jean-Baptiste Carrier est installé à Nantes par un arrêté du Comité de Salut Public du 29 septembre, où il demeure malgré un nouveau décret du 13 octobre l'affectant à l'armée de l'Ouest avec Bourbotte, Francaste & Turreau, cousin du général. Arrivé le 8 octobre, il trouve une ville profondément divisée entre les éléments populaires et les notables, mais déjà dotée des instruments nécessaires à la conduite d'une politique de terreur que Philippeaux, son prédécesseur, a mis en place, à savoir, un comité et un tribunal révolutionnaires, ainsi que la compagnie Marat, d'une soixantaine d'hommes recrutés sur le port, attachée au comité et chargée de missions de surveillance et de répression.

Carrier utilise le blé réquisitionné en Vendée pour nourrir l'armée et le petit peuple nantais, crée une police occulte, concurrente de la compagnie Marat, et "simplifie" la procédure du tribunal révolutionnaire. En décembre 1793, arrivent dans Nantes 8 à 9 000 prisonniers capturés lors de la Virée de Galerne et qui sont entassés dans des conditions épouvantables dans la "prison de l'Entrepôt des cafés". Devant le risque sanitaire né de l'épidémie de typhus qui se déclare dans les prisons, tuant sans distinction 3 000 détenus,  gardiens & médecins, le représentant Carrier recourt alors massivement aux noyades et aux fusillades pour vider l'entrepôt et les pontons. Du 16 décembre 1793 au 27 février 1794, il fait noyer de 1 800 à 4 860 prisonniers et en fait fusiller 2 600 à 3 600, pour la plupart des Vendéens, des Chouans, des suspects, notamment girondins ou fédéralistes, des prêtres réfractaires, des prostituées, des prisonniers de droit commun ou de guerre Anglais & Hollandais.

Ces exactions sont dénoncées par Jullien de Paris, agent du Comité de Salut Public en mission sur la côte atlantique, et Carrier est contraint de demander son rappel le 8 février 1794.

c/ La terreur angevine.

À Angers, où les envoyés en mission Hentz & Francaste sont également confrontés à l'arrivée de milliers de prisonniers vendéens après la bataille de Savenay, les militaires forment en janvier 1794 une commission militaire, la "commission Parein", qui condamne à mort 2 000 personnes pour "activité contre-révolutionnaire" {terme générique renvoyant aussi bien à une participation active à la rébellion qu'à la participation à une messe donnée par un prêtre réfractaire, à une simple parenté avec des insurgés ou même au refus de céder aux avances des juges !}. C'est ainsi que meurent à Angers plus de 1 400 prisonniers fusillés, guillotinés, ou de maladie. Une tannerie de peau humaine y est créée et 32 personnes sont écorchées pour faire des culottes de cavalerie...

Les 12 fusillades des Ponts-de-Cé font 1 500 à 1 600 morts de fin novembre 1793 à mi-janvier 1794, tandis que les 9 d'Avrillé en font de 900 à 3 000 de janvier à avril 1794, sans oublier quelques noyés...

Même sinistre bilan à Saumur, Doué-la-Fontaine, Montreuil-Bellay, Sainte-Gemmes-sur-Loire, Le Marillais, sans omettre non plus les Vendéens capturés lors de la Virée de Galerne et transférés à Blois, Chartes & Bourges, et qui ne reviendront pas.

d/ La dévastation de la Vendée.

Fin décembre 1793, le général Turreau prend la tête de l'armée de l'Ouest mais il est informé par le Comité de Salut Public et le ministre de la guerre de leur intention de retirer des troupes de l'Ouest pour les redéployer sur d'autres fronts, estimant les opérations dans l'Ouest presque achevées. Dans ces conditions, le 19 décembre 1793 Turreau propose à la Convention d'offrir une amnistie aux rebelles. Faute de réponse, estimant les rebelles encore dangereux, il rejette le plan de Kléber visant à quadriller la région et à rétablir la discipline parmi les troupes pour gagner la confiance de la population. Le 7 janvier 1795, Turreau demande des ordres clairs sur le sort des femmes et des enfants auprès des Représentants en Mission Francastel, Bourbotte & Louis Turreau, qui ne répondent pas, se déclarant malades. S'appuyant alors sur les lois Lazare Carnot des 1° août & 1° octobre 1793, comme sur divers décrets, il met au point un plan de campagne dans lequel vingt colonnes mobiles, dites "colonnes infernales", sont chargées de dévaster les territoires insurgés de la Vendée militaire, seules quelques villes indispensables à la marche des troupes devant être préservées.

Après la prise de Cholet par les Vendéens de Stofflet le 8 février 1794, la Convention somme Turreau d'attaquer en masse et d'exterminer les rebelles. Ne se sentant pas soutenu, Turreau présente par deux fois sa démission les 31 janvier & 18 février, à chaque fois refusée. Le Comité de Salut Public délègue alors ses pouvoirs dans l'Ouest aux Représentants en Mission Francastel, Hentz & Garrau, qui donnent leur approbation au plan de Turreau qui est mis en œuvre de janvier à mai 1794.

À l'est, Turreau prend personnellement le commandement de 6 divisions, scindées en 11 colonnes, tandis qu'à l'ouest, le général Haxo dirige 8 colonnes de taille plus réduites. D'autres troupes sont envoyées former les garnisons des villes à préserver. Toutefois les différents généraux interprétant librement les ordres reçus agissent de manière très diverses, certains comme Haxo, n'appliquant pas les ordres de destruction et de tuerie systématiques. Les membres de la Commission civile et administrative créée à Nantes pour récupérer vivres et bétail au profit des Bleus accompagnent les armées, ce qui permet également d'épargner des vies et des localités. Cependant presque toutes les colonnes se livrent aux pillages, massacrent la population civile, violant et torturant, tuant femmes et enfants, brûlant des villages entiers, saisissant ou détruisant les récoltes et le bétail. Les troupes commandées par Cordellier, Grignon, Huché & Amey se distinguent par leur cruauté, massacrant indistinctement royalistes et patriotes.



12/03/2017